Il fallait dans la vie savoir tirer partie de toutes les ressources sur lesquelles on pouvait mettre la main. Le mercenariat était une de ces méthodes pour arriver à ses fins. Et Severia n’avait pas choisit n’importe quel mercenaire : elle avait choisit la fureur écarlate, rien de moins. Il fallait quelque chose d’expéditif et de brutal pour régler la situation qui la préoccupait… Et la dite fureur ferait parfaitement le travail. Après tout… Ce n’était pas sur les terres qu’elle serait appelée à contrôler qu’elle allait l’envoyer. Il aurait pour tâche de se charger d’éliminer un espion d’Otian qu’elle avait découvert au sein du royaume et qui avait par conséquent prit la fuite avant son arrestation en bonne et due forme. Elle ne pouvait envoyer de détachement sans risquer d’incident diplomatique et encore moins le laisser filer. Elle savait où il était, elle avait simplement besoin de quelqu’un pour s’en débarrasser. Ne voulant pas faire dans la finesse, son choix était plus que judicieux. Et en plus, un village perdu hors d’Airian faisait une belle cible pour les pillards et autres gens du même acabit…

La rencontre était prévue dans son bureau de fonction et naturellement, des précautions supplémentaires avaient été prises pour que personne ne voit cet homme. Ce furent donc ses gardes personnels qui se chargèrent de l’escorter des portes du royaume à ici, après lui avoir prêté pour l’occasion une armure de garde pour éviter d’attirer les soupçons. Peu orthodoxe comme méthodes mais mieux valait garder profil bas. Qui plus était, avec la paie que Severia lui promettait, il serait même prêt à garder cette armure sur lui à jamais au besoin… Chaque personne a un point faible : argent, sexe, pouvoir… Il suffisait de trouver la bonne corde et de tirer dessus, sans plus. C’était cela qui faisait la beauté du monde, en tout cas selon la vision de Severia Palenix. Dans ce cas spécifique, il fallait beaucoup de sang… Et un massacre en bonne et due forme serait chose qui se fournirait de soi même. En fait… Ce ne serait pas UN massacre mais DES massacres… Il fallait savoir couvrir ses traces… Et elle savait que ce n’était pas au dessus des moyens de ce mercenaire. Après tout, il saurait apprécier la finesse de son plan… Même pour une brute épaisse dans son genre où taper était une forme de diplomatie.

Un des gardes de Severia frappa à sa porte et elle ordonna que l’on fasse entrer son… Invité. Habillée comme d’habitude avec des vêtements masculins qui contrastait avec son statut de femme, si on excluait qu’en plus elle portait des armes ce qui contrastait encore davantage, elle l’invita à s’asseoir avant de prendre la parole.

« Dites moi… Est-ce que cela ferait plaisir à votre dieu que d’avoir le sang et les crânes des populations entières d’une demi douzaine de villages? Parce que dans le cas qui requiert vos services, j’ai besoin de créer une belle illusion… Ce qui fait qu’un unique massacre serait révélateur de mon implication. Six massacres, perpétrés en apparence par plusieurs groupes, cela ne peut en rien me lier à l’affaire, n’est-ce pas? Vous commencerez par un village spécifique et le reste des cibles, tant qu’elles sont hors d’Airian, sont laissées à votre discrétion. Je vais avoir besoin d’une preuve de la mort de la cible principale… Et le reste vous regarde entièrement. C’est une proposition intéressante, vous ne pensez pas? Surtout pour ce que cela vous rapporte en bénéfices… »

Esquissant un sourire charmeur, Severia scrutait chaque réaction de la part du mercenaire. Chaque geste ou tic était révélateur, une faiblesse à exploiter… Et un autre as dans sa manche au cas où l’Autre serait réticent… Ce dont elle doutait fortement!

« La cible en question est on ne peut plus facile à reconnaître. Elle arbore une petite cicatrice qui rappelle une larme sous l’œil gauche et si vous parvenez à voir ses mains, vous remarquerez qu’il a un pouce plus court que l’autre. Un homme de grande taille, cheveux blonds, yeux bleus… Il a la carrure pour ressembler à un officier de l’armée… S’il porte des vêtements, il tentera sans doute de se fondre dans la masse donc quelque chose dans les teintes de brun et de vert… Le classique des classiques. »

Voyant qu’il posait la main sur la garde de son arme, Severia laissa échapper un petit rire amusé avant de se lever, faire le tour de son bureau pour se porter à sa rencontre, venant se planter face à lui, sans se soucier de l’arme que le mercenaire en face d’elle possédait et semblait prêt à utiliser. Elle le regarda longuement, l’amusement se lisant dans son regard, sans ciller ni broncher, un sourire charmeur sur le visage qui avait fait fondre bien des hommes. Cela l’amusait de voir les réactions de cette brute qui ne semblait en rien saisir les subtilités du monde, habitué comme il devait être à faire passer la force avant un usage judicieux de son cerveau...

« Voyons, vous êtes plus intelligent que cela… Vous devriez être en mesure de trouver vous-même la réponse à cette seconde question. Un simple objet pourrait signifier qu’il vit encore. Il me faut donc une partie de corps. D’un autre côté, vous pourriez prendre une partie du corps et livrer les objets au royaume dont il est originaire n’est-ce pas? Je veux donc le corps entier avec toutes ses possessions, c’est pourtant évident… Mais le corps ne sera pas ramené ici. Vous irez le porter à un groupe de personnes sous mes ordres qui se chargeront de l’identification et ensuite vous reviendrez ici pour votre paiement en espèce, en plus de tout ce que vous pourrez récolter directement sur le terrain. Ce serait bête de priver un mercenaire de la lucrative activité de pillage, non? »

Commençant à tourner autour du mercenaire, elle s’amusait du fait qu’il semblait perpétuellement sur la défensive alors que le vrai danger n’était pas dans cette pièce mais ailleurs. Si Severia Palenix l’avait fait venir ce n’était pas pour le trahir mais pour qu’il serve, pour un temps tout du moins, ses intérêts. Le fait qu’il manque cruellement de manières et de politesse ne l’indisposa en rien : elle avait l’habitude de traiter avec ce genre d’individus qui souvent se disaient que leur profession les dispensait des formalités d’usage. Quand elle serait reine d’Airian par contre, s’il retentait un coup pareil… La fureur écarlate, malgré toutes les prouesses dont elle était capable, ne quitterait simplement pas la salle du trône. Car même quand elle monterait sur le trône, le besoin de mercenaires serait toujours présent. C’était une réalité à laquelle on ne pouvait se soustraire : pour conserver le bon nom de l’armée, il fallait envoyer quelqu’un d’autre faire le sale travail… C’était d’une logique à toute épreuve!

« Vous verrez, ce n’est pas une tâche bien difficile, j’en suis convaincue. Un corps d’armée conventionnel pourrait le faire mais il laisserait des traces quant à son royaume d’origine. Vous, d’un autre côté, on peut s’attribuer vos services par l’argent et même si vous laissez des traces… Qui pourra savoir qui vous a envoyé? Personne. C’est ce qui fait toute la beauté de la chose et toute l’importance des mercenaires dans les affaires d’état… êtes-vous versé un minimum dans la politique? Si oui, vous savez d’ores et déjà à quel point elle peut être contraignante… Et demander des moyens détournés. »

Sortant d’un tiroir une carte pliée du continent, ou tout du moins du secteur dans lequel le mercenaire aurait à opérer, elle déplia l’ensemble pour lui montrer avec précision où il devrait se rendre, dans un petit village du nom de Lakeshire. Les informations présentes sur ce document étaient plus que fiable : elle avait envoyé toute une équipe d’Espion pour reconnaître le terrain et il y avait même un plan du dit village avec un nombre de détails plutôt impressionnant pour ce qui en apparence était une étude préliminaire de terrain… Dans les environs du dit village, il y avait à tout le moins une douzaine d’autres cibles d’intérêt où le mercenaire pourrait se rendre et répandre mort et destruction, tous aussi détaillés que le village « principal » au centre de cette mission… Severia Palenix n’était définitivement pas le genre de personne à laisser au hasard son mot à dire… Elle esquissa un large sourire en l’entendant exprimer son opinion sur la politique… Et elle laissa échapper un léger rire avant de se coller contre son dos et de murmurer quelque chose à son oreille.

« Parce que vous croyez vraiment que la simplicité existe ici bas, monsieur Mogrash? Si oui, vous vous rendriez alors compte que s’il y a bien quelque chose de simple, c’est justement la politique. Il y a un principe de base : ne se concentrer que sur ses intérêts. À bien des égards, nous sommes des mercenaires avec un titre et une faction d’appartenance. Juge, conseiller, roi ou prince, bourgmestre, maire, notaire ou collecteur d’impôts, quel que soit le niveau et le degré de politique, c’est le règne du plus fort comme dans la vie de tous les jours. Ce n’est pas la politique qui est compliquée, c’est le rapport à ses valeurs et celles du plus grand nombre. »

Revenant se planter devant le mercenaire tout en laissant courir un doigt sur sa poitrine couverte par l’uniforme de garde d’Airian, Severia observait chacune de ses réactions, chacun des gestes qu’il esquissait. Voir au fond jusqu’où elle pouvait aller dans son petit manège qui au fond était un peu de séduction sur fond de persuasion pour voir à quel point l’instrument de sa vengeance était malléable… Avoir les services d’un tel par l’argent, c’était une chose, Avoir ce qu’il faut en dehors d’une bourse bien pleine pour le faire revenir, ça c’était une toute autre affaire!

« Jusqu’à un certain point, vous et moi sommes identiques : vous vous imposez sur les autres, prenant des vies pour celui en qui va votre foi. Moi, j’administre et condamne au besoin pour la bonne marche de ce royaume. Tous deux nous refusons de nous incliner devant quiconque en dehors de nos chefs respectifs et vous comme moi servons avec zèle et loyauté. Ce qui nous différencie c’est que vous le faite pour l’argent et le sang, moi pour le pouvoir avant tout. En terme de contexte, vos allégeances vous offre plus de marge de manœuvre mais si j’avais le trône, cet avantage serait mit à niveau avec la capacité que j’aurais à décidé de qui est mon allié ou non… »

Elle aimait bien faire des parallèles, confronter les visions et observe comment l’interlocuteur en face tolérait la contestation, l’opposition de jugement. Après tout, on pouvait lire énormément du corps de quelqu’un et ce que les mots voulaient bien dire pouvait être contredit par le non verbal. Et de son avis personnel, la grosse brute avait plus de non verbal que de verbal… De cela il ne faisait aucun doute. Ce n’était pas une mauvaise chose en soi : les mots étaient les armes de Severia mais souvent c’est la force qui réglait les problèmes et offrait les meilleurs résultats…

Esquissant à nouveau un sourire charmeur, l’ombre vient se frotter lascivement contre le mercenaire, sachant pertinemment qu’il n’était pas indifférent à ce genre d’attentions. Elle aimait mettre son interlocuteur en face mal à l’aise si elle pouvait de ce fait gagner certains avantages… Et il fallait reconnaître qu’avec une proie comme celle là, il y avait fort à gagner… Il semblait totalement étranger au concept de douceur et de séduction et elle se délectait de son malaise et de son inexpérience… Dans le moment, elle se demandait davantage à quel point le mercenaire avait des lacunes côté relations publiques que de se concentrer réellement sur ses dires quat à sa vision des choses relative au pouvoir… Elle savait que le pauvre Umaro ne savait pas trop sur quel pied danser mais était vraiment important? Le fait était que le féroce et dangereux mercenaire était à peu près dans le même état qu’un animal prit au piège. Oh elle ne le pousserait pas passé la limite où le dit animal attaquait pour survivre… Mais juste assez pour conserver sa position dominante pendant un moment encore.

« Y aurait-il un problème, monsieur Mogrash? Je vous sens… Nerveux. Je ne vois pas en quoi, n’importe quelle femme avec un minimum de goût trouverait attirant ce corps musclé et sculpté et puis du reste, un peu de brutalité ne fait pas de tort dans le grand jeu des plaisirs… Est-ce là un champ de bataille qui vous est inconnu? Cela me surprend… En ce bas monde, comme je le dis toujours, il y a trois choses qui gouvernent l’humain en général : l’argent, le pouvoir et le sexe et pas spécialement dans cet ordre. Pour être un combattant efficace, il faut maîtriser ces trois champs de bataille… Vous devez le savoir mieux que quiconque, étant un guerrier redouté par une quantité appréciable de gens en ce monde et pas uniquement les faibles et les gens sans défense… »

Elle continua son petit jeu de séductrice, continuant à se frotter contre le puissant guerrier, appréciant justement cette espèce de paralysie qui semblait affecter le mercenaire qui, selon les spéculations de Severia, n’avait pas dû connaître beaucoup de douceur féminine dans sa vie… Cela venait sans doute expliquer cette incapacité à réagir de façon sûr et d’ainsi avancer à tâtons… Dans une pièce parfaitement éclairée. En un sens il y avait de quoi, Severia se serait retrouvée dans la même situation si elle avait eu à faire face à ce genre de situation sans y être préparée. Manque de bol pour le mercenaire : on disait que les Palenix apprenaient à mentir, à baiser et à assassiner avant même de marcher… C’était exagéré comme affirmation mais bon, c’était dire où se situait, entre autre, le gros de leur entraînement. Autrement dit, une experte devant un simple néophyte. Cela avait à tout le moins le mérite d’être amusant et ce malgré le fait que s’il l’avait voulu, Umaro Mogrash aurait certainement pu casser comme une brindille Severia qui était bien moins imposante que lui et ce n’était pas peu dire. Il était loin d’être petit, ce mercenaire là, très loin de là même. Il dominait sans doute l’homme moyen d’une bonne tête et faisait sûrement une demi fois sa largeur également…

« Dois-je en déduire que là d’où vous venez, les femmes ne font pas montre de douceur? C’est bien dommage pour vous que de ne jamais avoir connu notre douceur, je suis persuadée que vous auriez grandement apprécié… Vous savez ce qu’on dit là d’où je viens? Une femme peut vivre sans homme mais jamais l’homme ne pourra vivre sans la femme. Elles sont à ses yeux le plus grand des trésors. Vous devriez méditer là-dessus, je suis persuadée que vous ferez une intéressante réflexion… »

« Moi? Vous ensorceler? Vous rêvez mon cher, profondément même. Je n’ai fais usage d’aucun sort, d’aucune magie contre vous. Ce que vous ressentez vient uniquement de vous et non de moi. Ce sont simplement des sentiments et des émotions que vous n’aviez jamais ressenti auparavant. Après tout… Pour ce que j’en sais vous venez d’un endroit où amour et tendresse ne sont pas souvent à l’ordre du jour. Ce n’est pas un maléfice, monsieur Mogrash, il s’agit purement et simplement d’une réaction normale quand on éprouve une certaine attirance pour quelqu’un. »

Alors que techniquement elle aurait dû contester ou se plaindre du traitement et des manières du mercenaire, Severia au contraire resta de marbre dans la mesure où elle pouvait parfaitement comprendre sa réaction. Il n’avait jamais connu l’amour d’une femme… Et celles qui avaient dû le voir avait soit fuit ou été tuées par lui… Tout du moins le supposa t’elle! Il n’avait pas l’air d’être le genre d’homme à offrir des fleurs et autres attentions à la gent féminine et il semblait être encore moins l’archétype du gentil voisin parfait… Mais bon, apprendre à la grosse brute les sentiments et les émotions était parfaitement à sa portée, les ombres étant des champions incontestés dans la manipulation de ces dernières… Et elle était particulièrement douée elle-même dans ce genre de choses. Elle allait défendre son point jusqu’au bout : hors de question de se faire accuser de ce qu’elle n’avait pas fait! Il avait vu un côté des pulsons qui habitaient les êtres vivants… Il suffisait de lui faire voir l’autre côté maintenant…

« À cela j’ajouterais que vous n’avez expérimenté qu’un unique côté des pulsions que les vivants ressentent. Par opposition, si on veut, à la violence, il y a le plaisir. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’en est pas moins intense. Loin de là même. Et le distance n’a rien à voir, monsieur Mogrash, cela n’a rien à voir avec la magie et les sorts. Vous pourriez vous exiler aux confins d’Érade et pourtant ressentir des émotions pour quelqu’un se situant à des kilomètres de vous. C’est ce qu’il y a de particulièrement admirable avec les être vivants : autant la distance peut être une immense préoccupation comme elle peut autant vous passer à des mètres au dessus de la tête. Observez… »

Entrouvrant savamment la tunique de fonction qu’elle portait, qui se déboutonnait de l’avant donc, elle laissa voir suffisamment de la chair située à cet endroit pour faire baver n’importe quel homme ordinaire. Dans le cas du barbare, elle ne s’attendait pas à une immense réaction, non mais à tout le moins à ce qu’il continue à éprouver ce qu’il attribuait à tort à un sortilège ou un maléfice quelconque. Le physique de Severia avait été pensé, planifié, anticipé pour faire réagir positivement le plus grand nombre de gens possible et cette apparence par conséquent était faite pour séduire, faite pour être regardée et désirée. Rien n’avait été laissé au hasard car telle n’était pas la mentalité des Palenix… On planifie ou on ne planifie pas, il n’y a pas de milieu ou de nuance… Et si le mercenaire allait raconter ce qu’il avait vu à d’autres moins axés sur le sang et les crânes, il se rendrait compte que les dires de Severia étaient encore plus véridiques que ce qu’elle avait bien daigné lui dire. On parlait de Severia parmi les gardes et certains poussaient la chose jusqu’à parler ouvertement entre eux de leurs fantasmes la concernant. Elle était au courant, elle aurait pu faire châtier sévèrement les coupables… Mais c’eut été stratégiquement stupide et parfaitement futile comme manœuvre aussi préférait-elle une approche plus ouverte en apparence mais extrêmement stricte en réalité…

Refermant sa tunique et abandonnant tout jeu, la conseillère royale reprit son attitude de glace et professionnelle avant de reporter son attention non pas sur le barbare mais sur une carte affichée sur un des murs de son bureau. Contrairement à bien des ombres qui avaient parfois tendance à se laisser emporter par l’intensité du moment, Severia s’était longuement entrainée pour pouvoir en sortir sans trop de mal et ce en l’espace de quelques secondes. De toute façon, elle avait obtenu e qu’elle voulait : cet homme là ne lui était plus d’aucun intérêt en terme d’étude. Un rustre, une brute, un sauvage qui ne connaissait rien à la douceur, un vulgaire instrument sans finesse ni subtilité. Décevant, cruellement décevant que de le savoir parmi les meilleurs de sa profession et pourtant si simple d’esprit et si peu réceptif aux subtilités du monde… Mais bon, en retourner aux affaires était un bon moyen de masquer sa déception. Dommage, il aurait pu faire un excellent agent libre au sein des forces qu’elle avait constitué et continuait à constituer pour mettre ses plans à exécution…

« Oui, bien sûr, les affaires… Il va falloir être prudent, monsieur Mogrash, très prudent. Pour ce que j’en sais, Otian a peut-être déjà mit sur pied une équipe pour récupérer son espion auquel cas aucun d’entre eux ne doit retourner vivant dans le royaume pour les prévenir si quelque chose venait à mal tourner. D’après nos récentes observations, si équipe de soutien il y a, elle va venir d’ici. »

Fit savoir l’ombre en indiquant un point sur la carte. Dit en plus clair : si tu ne veux pas te ramasser avec des emmerdes de la part de ton patron, arranges toi pour agir vite. Autrement et c’était bien connu, ;e employeurs avaient tendance à déduire une certaine somme du paiement total, des pénalités pour inconvénients causés. Et un mercenaire digne de ce nom détestait perdre de l’argent sur son pactole et par conséquent faisait le nécessaire pour éviter bourdes et complications. Tout du moins, c’était là un trait qui différenciait l’amateur de l’expert qui lui au contraire pouvait se récolter un joli bonus à la place qui venait lui faire par conséquent gagner davantage… Si Umaro Mogrash était intelligent, il ferait en sorte de revenir aussi vite qu’il partirait et sans morts additionnelles du côté d’Otian. Plus il y aurait de morts de leur côté, plus les risques d’investigation risquaient d’être élevés… Et une belle piste bien chaude menant directement à Airian était une chose dont Severia se passerait plus qu’aisément, surtout en ce moment où elle préparait quelque chose de gros pour assurer ses arrières et sa montée prochaine sur le trône. L’erreur était exclue d’office et il était hors de question qu’une grosse brute vienne détruire des mois de patiente planification. S’il osait rater son coup… Professionnel ou non, il ne quitterait pas le palais vivant, de cela il pouvait en être sûr et certain. Comme tout bon Palenix qui se respecte, Severia avait l’échec en sainte horreur… Un trait de famille qui avait tendance à déteindre dans leur vie professionnelle…

« Bien sûr, je suppose que vous êtes suffisamment malin pour savoir que plus vous aurez à confronter de forces étrangères, plus vous risquez de faire plus de mal que de bien dans cette affaire. Vous êtes un professionnel, un des meilleur si ce n’est le meilleur… Je m’attends par conséquent à une exécution parfaite de cette mission. Vous savez ce que l’on dit : réussissez et je vous couvrirai d’or, échouez et vous ne vous en sortirez pas à très bon compte. Je trouverais regrettable d’avoir à me passer de vos services dans le futur car un atout comme vous est excessivement précieux… »

« Je vous dirais bien bonne chance, monsieur Mogrash… Mais je pense que bonne chasse sera plus approprié. Si vous préférez, je peux aussi ajouter une bénédiction de guerrier que je connais : que jamais ton arme ne te fasses défaut. »

Esquissant un large sourire en imaginant sans mal la surprise du barbare en entendant une bénédiction de guerrier de la bouche d’une vulgaire gratte papier, aussi noble et importante soit-elle, Severia congédia d’un geste cet homme qui déjà avait commencé à quitter son bureau. Une fois qu’il fut partit, une porte secrète coulissa dans le bureau de la première conseillère et un homme en sortit. Tout de noir vêtu, il semblait se fondre dans tous les milieux et quiconque le regardait finissait par l’oublier au bout de quelques secondes. Un des espions de Severia, celui qui se chargerait qu’Umaro Mogrash fasse son travail sans accroc. D’un signe de tête, Severia l’invita à s’asseoir.

« C’est lui que tu devras surveiller. Assures toi pour intercepter le commando d’Otian quand il se pointera si tu vois qu’il arrive dans le même secteur que notre mercenaire. Aucune action mortelle si tu peux l’éviter mais au moins le ralentir. Avec un peu de chance, nous pourrons user de cet… Incident à notre avantage. Avec l’attention du monde sur la zone dans laquelle Umaro Mogrash va opérer, nos convois vont pouvoir passer sans être vus. Faire d’une pierre deux coups, c’est plutôt ingénieux, non? »

L’homme de l’ombre se contenta d’acquiescer, sans dire un mot. Il n’était pas pour parler, il était payé pour que les opérations de Severia se passent sans problèmes. C’était un expert et un professionnel et cet elfe de la pénombre savait servir les intérêts de la régente. En fait, s’il y avait bien une race que Severia respectait en dehors des ombres sur Érade, c’était bien les elfes de la pénombre car une partie de leurs pouvoirs finissait par ressembler à ceux des ombres. De plus… Elles savaient aussi reconnaître le vrai sexe fort. Severia n’aurait eu aucun mal à s’incliner devant leur déesse… Si bien sûr cette dernière était prête à faire de même en retour, il allait de soi. Après une courte pause, la conseillère reprit la parole en pointant la parole et en désignant un point sur la carte qu’elle avait volontairement omit de montrer à Umaro.

« Tu te chargeras également de cette localité spécifique. Si mes espions sont exacts, il y a une petite fortune à ramasser détenue par des marchands étrangers… Fais le nécessaire pour qu’elle s’ajoute à nos coffres mais je ne veux pas de massacres. Ton style et le sien sont trop différents pour que l’on ne le remarque pas… Bonne chasse à toi aussi… »

Quittant la pièce aussi silencieusement qu’il était arrivé, l’agent de Severia quitta la pièce pour commencer sa traque du mercenaire et sa mission. Seule pour de bon cette fois, Severia éclata d’un grand rire froid avant d’aller se verser un verre de vin. Cette affaire dans son ensemble allait faire beaucoup de bien à sa cause et cela lui permettrait de clore un chapitre dans ses divers plans et manigances. Elle leva son verre à un Umaro Mogrash absent, à son succès et aux affaires futures avant de prendre la parole pour un dernier monologue avant de retourner à ses dossiers plus officiels.

« À Umaro Mogrash, mercenaire des terres oubliées qui va faire bien plus qu’il ne peut simplement l’imaginer. Que son ignorance soit bénie à jamais… »