Planifier sa montée sur un trône et ce quel qu’il soit demandait du temps. Beaucoup de temps. Dans le cas de Severia Palenix, première conseillère du roi d’Airian, il était tout simplement impensable que de négliger la raison principale de sa présence dans cette contrée. Son temps libre n’avait qu’un but : faire progresser son projet de prise de contrôle forcé du trône. Quelle ne fut pas son irritation et sa frustration que d’apprendre que le conseiller royal d’un autre royaume, celui d’Amilian, désirait s’entretenir avec elle… Comme si elle avait du temps à offrir à ces gueux des autres royaumes! Elle se moquait bien de ces autres nations belliqueuses, ce qu’elle voulait elle c’était Airian sur un plateau d’argent pour en faire la prochaine force militaire du continent… Et ensuite dominer le monde, rien de moins. Pourquoi ne pas tenter sa chance après tout? Elle avait su manœuvrer à la perfection jusqu’ici… Non, là elle voyait à bien trop long terme. Il fallait se fixer des objectifs réalistes. Son regard se posa sur sa dague qui reposait dans son étui de botte : oui, elle aurait une place parfaite entre les deux épaules du roi… à moins qu’elle ne se décide pour le poison, elle verrait selon l’envie du moment… Ou selon la situation qui s’offrirait à elle.

Reportant son attention sur le document qu’elle rédigeait, elle ne put s’empêcher d’esquisser un large sourire. Augmenter les ratios alloués à la chasse, la bonne blague… à ce train là, dans cinq voire dix ans, il n’y aurait plus de proies dans les environs immédiats de la capitale… Ni de prédateur et la végétation pousserait. De fait, elle pourrait implanter certaines réformes de culture, si le terrain permettait un minimum d’agriculture. En changeant le mode de production alimentaire et la diète… Elle viendrait attenter, en un sens, à des siècles de tradition en matière de subsistance. Le peuple n’apprécierait pas le changement, il y aurait du ressentiment contre le roi, elle sauverait le jeu, mettrait encore ces crétins de paysans dans sa poche… Et elle ferait encore un grand pas vers le trône. Rendre le nouveau souverain impopulaire, quelle idée de génie… Avec un peu de chance… Elle n’aurait pas à lever le petit doigt pour changer les choses… La tête du roi, ce serait le peuple qui l’aurait et ensuite à elle la couronne…

Un serviteur frappa à sa porte, annonçant l’arrivée de ce gêneur venu d’un royaume distant. Ravalant une injure, elle ordonna au serviteur de faire patienter l’autre. Un bon quart d’heure, le temps de finir son rapport de propositions et de montrer à ce blanc bec qu’ici, les gens travaillaient pour vrai et que l’on n’interrompait pas l’appareil étatique dans sa marche pour le maintien du royaume… S’il ne saisissait pas le message… Il allait en voir des vertes et des pas mûres car Severia portait bien son prénom…

Les quinze minutes écoulées, le serviteur revint et sous un signe de tête de sa supérieure, il fit entrer le visiteur dans les quartiers de la conseillère royale. La tête penchée sur un autre rapport qu’elle venait de commencer pour montrer qu’elle travaillait et que son temps était précieux, elle ne releva la tête que quand l’autre fut devant son bureau.

« Conseiller Kaleth Im' Aurik je présume… Je suis la conseillère royale Severia Palenix. Vous comprendrez j’espère la nécessité de cette attente involontaire : les affaires d’état ne peuvent attendre et en tant que conseiller, vous mieux que quiconque devez comprendre cet état de fait. Prenez un siège et mettez-vous à l’aise : je ferai ordonner qu’on vous amène à boire et à manger. Ceci dit… De quel sujet désiriez-vous vous entretenir avec moi? Nos deux royaumes sont en paix et le commerce ne fait pas partie de nos prérogatives… Je ne vois pas en quoi nous pourrions être d’une utilité quelconque à votre souverain ou à votre royaume. Je ferai mon possible pour vous aider toutefois… »

Une ombre face à une ombre. Les ténèbres rencontrant les ténèbres. Le mal qui reçoit le mal… Fascinant. Il y avait des décennies qu’elle n’avait pas vu ne serait-ce qu’un de ses semblables. Avaient-ils oublié jusqu’à son existence? Son but avait toujours été de garder un œil sur ce trône… Et apparemment IL revenait mais trop tôt, bien trop tôt… Toutes les pièces étaient en place mais il fallait un peu plus de temps… Qu’importe. Airian ne se libèrerait pas de son emprise et s’il fallait changer de tactique, soit, elle y était préparée. Des plans… Sa vie semblait n’avoir été faite que de cela… Et si la surprise fut présente en elle, elle n’en laissa rien paraître. D’apparence, elle restait la très professionnelle et dévouée conseillère royale, celle dans les veines de laquelle la glace semblait couler… Elle resterait dans son rôle pendant tout l’échange, jouant son jeu préféré, celui de la tromperie. Pour son homologue, l’échange serait d’une limpidité. Pour un espion éventuel… Il serait à des lieues de se douter de ce qui se tramait en cette pièce… Et ce ne serait qu’une manifestation évidente de l’imbécillité humaine.

« Je crains fort que vous vous soyez trompé d’endroit, conseiller. Dans son état actuel, le royaume d’Airian ne consentira à aucune alliance avec quiconque. Cependant, cela n’exclut pas que certains représentants du pouvoir en place ne se pencheront pas sur la question. L’absence de volonté diplomatique courrouce bien des personnalités de ce royaume. Plusieurs voudraient voir Airian plus expansionniste qu’isolationniste. »

Du grand Severia. Une maîtresse des mots qui s’en servait à des fins variées, allant de la séduction à la persuasion… Sans avoir besoin de faire usage de son pouvoir de suggestion, la plupart du temps. Se levant et faisant le tour de son bureau, elle s’approcha de son visiteur et laissa courir ses doigts là où se trouvait la marque de son visiteur, un sourire plein de promesses sur le visage. Le faisant s’asseoir, elle alla elle-même s’asseoir sur son visiteur avant de lui murmurer quelques paroles à l’oreille. De cette manière, un espion penserait sans doute à un des jeux politiques auquel s’adonnait la conseillère royale qui n’hésitait pas à faire usage de ses charmes pour sauvegarder les intérêts de la couronne. C’est ce que le monde pensait et leur méprise était chose excellente pour elle. De conseiller à conseiller, on aurait pu croire que ces deux là avait une histoire, au vu des manières de la ténébreuse conseillère… Mais non.

« Après tout ce temps vous daignez enfin vous rappeler de moi? Voilà qui est profondément amusant et c’est comme par hasard quand la complétion de mon plan pour m’emparer du trône est à portée de main que l’un des nôtres se décide à réapparaître… Vous m’auriez déçu autrement je dois l’avouer… Heureux de voir que tout ceci ne fut pas gâché en pure perte. Mais bon, quelles sont les attentes que vous espérez de moi? »

Oh il ne fallait pas se leurrer : Severia, bien qu’une indépendantiste dans l’âme et une solitaire pratiquement convaincue, effets secondaire de trop de temps passé auprès d’une nation vivant pratiquement en autarcie, avait toujours conservé son allégeance pour sa patrie et sa nation d’origine. Quand elle s’était portée volontaire il y avait de cela des décennies pour implanter une présence ombre solide à Airian, elle ne s’attendait pas à ce que le grand jour arrive si vite… Mais bon, le plus tôt serait le mieux, tant et aussi longtemps qu’il ne fallait pas brusquer les choses. Car la prudence, même devant le retour imminent du très grand, ne serait pas sacrifié pour une hâte aveugle…

Elle en était maintenant convaincue : il n’y avait aucun espion dans cette pièce. Dès qu’elle commençait le jeu de la séduction, ces êtres retors et traîtres se trahissaient eux-mêmes, s’approchant pour tenter d’entendre ce qui se disait à mi-voix… Et apprécier le spectacle. C’est à ce moment là qu’en bonne prédatrice elle leur tombait dessus et… Les murs de cette pièce, enfin, la pièce dans son ensemble n’avait pas été insonorisée pour rien. Devant le roi, c’était pour obtenir un climat plus propice au recueillement et à la réflexion. Dans es faits… Torturer un espion était toujours chose agréable après une dure journée de labeur… Et puis disposer des corps n’était pas un problème en soi. Quand vous avez des sous-fifres loyaux et dévoués, les possibilités d’agir et de faire devenaient bien plus grandes et diversifiées…Savoir s’entourer des bonnes personnes était un art en perdition mais elle le maîtrisait à la perfection…

Justement, cette ombre qui jouait son jeu ferait un excellent acquis dans son entourage à l’étranger. Chose certaine, ce Nagash savait y faire et ses attentions étaient loin d’être désagréables… Pour une rare fois, Severia Palenix était prête à prendre un léger retard su ses affaires en cours pour s’adonner à un jeu auquel elle n’avait plus joué depuis un moment déjà. La situation actuelle des choses ne lui avait hélas pas permit grand-chose de plus que son « travail de bureau »… Un large sourire carnassier apparut sur son joli minois et elle susurra ces paroles à l’oreille de son homologue.

« Je sais où se trouve mon allégeance, de cela vous n’avez pas à vous inquiéter. Et je dois admettre que vos propos sont fort intéressants. Cela donne matière à réflexion et cela mérite d’être minutieusement observé… »

Attirant contre elle le faux conseiller, ce fut à son tour de l’embrasser et elle prolongea le baiser de plusieurs secondes, ne relâchant son étreinte que pour reprendre son souffle. Descendant du bureau d’une manière à en faire réagir plus d’un, il vint se blottir contre le faux humain avant de commencer à jouer après les attaches qui maintenaient sa tunique en place. Elle se sentait revivre : le travail de bureau était si abrutissant, morne et sans joie…Entrouvrant le devant de la tunique, elle passa une main douce sur le haut du torse de Nagash avant de le griffer légèrement, observant ses réactions, son regard ancré dans celui de son congénère. Et on pouvait en lire plus long que ce qu’elle aurait pu faire savoir verbalement. Le langage non verbal faisait parti de l’arsenal de la belle et c’était tout simplement un autre moyen pour elle de s’emparer de ses proies. Entre ombres, les aptitudes des uns et des autres servaient au divertissement mais bon, comme toute autre race existant en ce monde, tous avaient des besoins…

« Airian est un endroit excessivement froid, ce qui force un individu à se rapprocher des autres. Une des premières choses que l’on apprend pour survivre c’est de savoir partager sa propre chaleur en cas de besoin. Cela a amené les gens à chauffer leurs demeures… Et dans certains cas comme ici, à trop chauffer les pièces. Vous seriez bien mieux sans ces lourds vêtements que vous portez, ne pensez-vous pas conseiller? »

Murmura t’elle au creux de son oreille avant d’en saisir le lobe entre ses dents fines et de le mordiller. Le jeu… Pourquoi s’en priver? Et puis du reste, personne ne pourrait entrer dans son bureau sans qu’elle ne le sache donc aucun risque de se faire prendre, ce n’en était que plus tentant encore…

« Les Palenix ne servent aucun maître, ils ne sont que ceux qui œuvrent pour offrir toujours plus à notre fière race. Si votre lignée elle se subordonne sans jamais faire acte de volonté propre tel n’est pas le cas de la mienne. Oui nous servons le très grand mais nous servons les nôtres avant tout. Si ses intérêts sont les mêmes que jadis, nous rejoindrons sa cause. Si l’hégémonie des ombres, de toutes les ombres, passe en second pour lui et que le profit personnel est son moteur, je refuserai de servir. Les ombres sont faites pour œuvrer ensemble et non les unes contre les autres, tout du moins, c’est ainsi que devraient être les choses. Les divisions finissent par causer la chute. »

Répondit Severia avec un large sourire de félin, une réponse plus faite pour faire sourire que réellement réfléchir. Chaque ombre avait sa place sur l’échiquier mondial et chaque famille œuvrait pour atteindre un but précis, tel qu’il avait été ainsi demandé par le père de toutes les ombres. Severia ne remettait pas en doute les desseins de Zacharia en tant que tel mais elle préférait jouer la carte de la prudence et voir si certaines ombres avaient été corrompues avec le temps. Sans lignes directrices, les êtres avaient tendance à agir pour leur propre intérêt uniquement… Pour le meilleur et trop souvent le pire. Si Severia devait faire front avec les autres sous la bannière d’un chef commun, autant s’assurer, bien que ce soit du ressort de la paranoïa, d’aller dans la bonne direction…

Mais bon, ce n’aurait pas été Severia si même devant une situation aussi capitale elle n’avait pas été vraie à elle-même. Regardant son homologue dans les yeux, cette même lueur continuant de briller dans son regard, elle rapprocha son front du sien jusqu’à ce qu’ils se touchent puis que leurs lèvres se touchent, permettant à Nagash d’obtenir un avant-goût de ce qu’était Severia. On ne l’oubliait pas de si tôt une fois qu’elle vous avait dans ses filets… Et certains même ne l’oubliait tout simplement jamais. Elle adorait le jeu, les tactiques peu orthodoxes, s’amuser avec ses alliés et ses ennemis pour la rendre encore plus difficile à suivre et à lire… Bien malin sera celui qui un jour saura voir au fin fond des fin fonds de Severia Palenix, ombre parmi les ombres qui pourtant savait sans même se donnait la peine, sans même faire d’efforts, se démarquer positivement du lot… Décollant ses lèvres après un long moment, elle reprit la parole.

« Vous vous en faites bien trop. Cette pathétique lignée tombera comme les vulgaires mouches qu’ils sont et personne ne se mettra en travers de notre destinée. Avec Airian dans notre poche et les ressources à sa disposition, je doute que le monde actuel puisse lutter sur deux fronts dans une lutte sans merci contre notre fière race… Et puis si la réputation de ce Thanos s’avère exacte, tout ce qu’il vous faut c’est la bonne paire de sein pour faire tomber cet homme qui selon la rumeur aime bien fréquenter intimement la gent féminine… Cela dit, même pour notre cause, c’est un être qui jamais ne partagera mon lit… Il y a des limites à la vermine que j’autorise dans mes… Relations. »

Typiquement Severia ça. Si elle ne vous parlait pas de sujets sérieux comme la politique, l’héraldique, l’histoire ou même la géographie, elle en profitait pour se moquer des autres, se délectant de la façon dont tout ce qui vivait ici bas était gouverné par ce qu’ils avaient dans le pantalon, mâles comme femelles… La corruption était son domaine et elle aurait pu donner des leçons même aux démons tant elle était bonne marionnetiste. Les Palenix faisaient danser ceux qui tombaient dans leurs magouilles depuis plusieurs siècles après tout, ce n’était pas à veille de changer non plus…

Une atmosphère sucrée avait laissé la place à une ambiance nimbé des flammes de l’honneur et de l’ambition. Elle voulait offrir un avenir prometteur à ceux de sa race et en cela, Nagash ne pouvait que la respecter mais c’était sans compter le retour inopportun de leur ancêtre, le grand Zacharia. Il revenait prendre pied en ce monde après avoir disparu des années durant mais cela, son disciple en avait cure. Semait le désordre et le chaos, planter la graine de la discorde et récolter les fleurs naissantes de la désolation, voila quelles étaient les plans de son maître il y a longtemps et il n’y avait guère de chances que cela avait changé. Les Ombres avaient prit possession de ce qu’ils avaient pu, s’accaparant pouvoir et richesse dans ce monde qui voulait leur perte et maintenant, l’idée de perdre cela sous les caprices enfantin d’un être à la pensée oisive était tout bonnement hors de question. Pourquoi respecter les vœux d’un maître qui avait fini par nous trahir ? Pourquoi continuer d’œuvrer pour celui qui nous avait laissé en proie à nos chasseurs, notre tête offerte à leur bon vouloir ?

Severia avait répondu avec justesse à la proposition de son homologue Ombre mais cela n’était guère suffisant. Etait-ce un test ? Bien sur, cela en est toujours un. On ne regarde pas les Ombres avec la seule vision de ce qu’ils disent ou ce qu’ils font. Il y a toujours un vice caché, une pensée dissimulé dans leurs paroles ou leur actes car ainsi va la vie de ceux qui furent si longtemps traqués et pourchassés. La présente intendante du royaume d’Airian avait combattu et œuvré pour ce qu’elle possédait aujourd’hui et le combat ne s’arrêterait pas la.

« Voila une Ombre que j’aime à regarder et à écouter. Pas une de ces fidèles dévots a une cause qui n’existe plus et pas non plus de ces mégalomanes qui finiront par sombrer aussi bas que le sont leur plans hasardeux. »

Des mots bien mystérieux quand on considère qu’il y a quelques minutes, il plaidait pour l’obéissance absolue en leur maître disparu. Mais la vie est bien complexe et certains peuvent se dire sans détour que c’est dans le néant que les existences des Ombres finiront si ces derniers n’en venaient pas à acquérir davantage de puissance.

« Zacharia revient, oui mais ce n’est pas la une fin en soi. Jusqu’à preuve du contraire, il œuvre toujours pour son idée de vengeance et de destin chaotique mais ce n’est pas ce dont nous avons besoin. A quoi sert-il de continuer ce combat alors que les forces s’entrechoquent sur ce monde en perdition. Nous pouvons rassembler le pouvoir qui est a notre portée mais il ne faut pas l’offrir en sacrifice a un esprit malade dénué de tout grâce. Mais il va venir, notre maître viendra ici, c’est inéluctable et tout ce que tu auras fait, il te le prendra au nom illusoire de la cause des Ombres pour servir ses intérêts avant tout autre chose. »

Oui, c’était un fait, un évènement bien certain telle la branche tout à fait inébranlable d’un arbre centenaire qui ne ploie sous le vent. Zacharia viendra et s’accaparera tout ce qui a été construit, un monstre d’avidité qui voudra tout détruire.

« Sache bien ceci, le chaos est tout ce qu’il lui importe et la vie même des nôtres n’est la que pour lui apporter cette satisfaction. »

Mais autre chose était à l’œuvre ici…

« Tout à fait dans une autre optique, le monde est en plein changement et une reine à de nouveau émergé chez les elfes… Ces elfes obscures qui ont jadis reniés les leurs, ils vont venir s’installer sur ces terres, peut être faut-il y voir de probables alliés contre la guerre qui menacera bientôt les portes de ton fief si chèrement acquis. Prends tout de même garde à eux, la trahison ne leur pose guère de problèmes mais leur force est indéniable. »

Oui, il fallait compter sur leur présence ici car bien que leur aide n’est pas vraiment indispensable, se retrouver avec un ennemi a l’intérieure de nos propres frontières, voila qui n’est pas très engageant. Le baiser de Severia avait été passionné et donnait lieu de vouloir bien davantage. Passant une main sur la douce et suave peau de la belle, Nagash ne pu s’empêcher de se demander s’il valait bien de s’arrêter la…

« Ma chère, vous voir me laisse à penser qu’il est fort dommage de contempler ainsi des édifices majestueux sans pouvoir les visiter. Les beautés de ce monde sont si souvent délaissées… En espérant que notre association plus que prometteuse vous permette de trouver votre bonheur dans une étreinte langoureuse et l’affrontement de nos idées les plus tenaces pour un épanouissement sans cesse grandissant de tout ce qui saura vous faire envie… »

« Les Palenix n’ont pas œuvré pendant des siècles pour s’emparer de ce royaume pour le voir détruit par l’ambition de quelconque. Si pour préserver ce royaume il faut s’adonner à l’acte de trahison, je le ferai sans hésiter, mon ténébreux collègue. Nous avons travaillé trop dur pour tout perdre après l’avoir acquis. »

La voix de Severia s’était faite glaciale et nul ne pouvait douter qu’elle préférait la mort à perdre Airian, la disgrâce à laisser son trophée et le ban à sa couronne future. Elle jaugea du regard son homologue comme un prédateur regarde sa proie, avant de se fendre d’un large sourire. Nagash n’était pas un imbécile. Il ne serait pas venu la prévenir s’il n’avait pas eu quelque chose en tête. Severia aussi commençait à entrevoir plusieurs possibilités… Dont une qu’elle trouva particulièrement intéressante. Il existait tant de forces en Érade qui voulait la mort de tout ce qui représentait le mal… Et Zacharia ferait une cible de choix. Si on ne pouvait suspecter la nature de Severia, le maître des ombres lui ne pourrait jouir de la même couverture. Il y avait tant de factions à manipuler pour se débarrasser de ce sale profiteur assoiffé de vengeance…

Les malarians, par exemple. Il suffisait de les contacter par un intermédiaire quelconque pour les envoyer en chasse. Mieux… Les troupes de cet imbécile de Thanos pour faire régner davantage de paranoïa dans sa petite tête bien vide. Ou plus sadique encore, le livrer aux démons. Des informations plus que le personnage en soit… Mais ce serait un bon début. Si Zacharia disparaissait de la carte, le royaume d’Airian, future patrie des ombres, serait à l’abri de cet être qui causerait leur perte… Il faudrait jouer serrer, prendre des risques et oser se mouiller… Mais la belle Severia n’était pas sans puissants alliés au sein de sa propre cour. Elle avait plusieurs bons éléments sous la main qui pourrait l’aider à créer les fausses preuves les plus parfaites qui soient… Des preuves qui lui assureraient la stabilité dont elle avait besoin pour le restant de ses jours.

Si Severia pensa à tout cela en même temps qu’elle écoutait son homologue… Elle ne manqua en rien la dernière partie de son discours. L’invitant à le suivre, elle le dirigea vers un globe terrestre représentant le monde connu et alors qu’il se penchait pour regarder le point qu’elle lui désignait, subterfuge pour pouvoir commencer la suite de son petit jeu, elle lui prit la tête et fit faire à cette dernière un superbe plongeon dans son décolleté. À moins d’être hostile à la beauté, Nagash ne manquerait pas d’apprécier la vue… C’était les paroles de son homologue qui lui avait donné l’idée, avec tant de belles allusions et de possibilités d’interprétation…

« Vous vouliez, mon cher Nagash, visiter de majestueux édifices? Pourquoi ne pas commencer par ces deux monuments à ma gloire, deux symboles qui ont mit à ma botte plus d’hommes que je n’ose en compter? Si vous tenez à voir l’œuvre complète, la cité entière qui abrite toutes ces merveilles… Libre à vous d’enlever… Je veux dire de lever le voile sur cette dernière. N’avez-vous jamais entendu dire que chaque corps était comme une ville et que l’on voit à un bon gestionnaire comment il s’occupe de son corps? Qui plus est, je crois que votre passeport est en règle pour en visiter le point le plus privé, le plus secret et le plus convoité de ma cité… »

Entre ombres, on aimait se provoquer. Si les Palenix ajoutaient au vice l’inceste, toutes les familles d’ombres n’étaient pas si consumées par leurs soifs mais bon… Severia et sa lignée entière avaient toujours été parmi les plus digne représentant de cette race et une des plus fières à fouler le sol d’Érade. À ce juste titre… Tout temps mort était un bon moment et tout bon moment pouvait devenir un moment exceptionnel…